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Observatoire des Actions de Groupe

L'action de groupe concurrence

Action de groupe consécutive à des condamnations pour pratiques anticoncurrentielles

Afin de permettre notamment la réparation des préjudices découlant des ententes (comme dans l’affaire Cartelmobile, des abus de position dominante, des abus de dépendance économique, de prix abusivement bas, l’action de groupe du Code de la consommation couvre également un pan du droit de la concurrence, à savoir celui des pratiques anticoncurrentielles (C. consom., art. L. 623-24 à L. 623-26).

L’action de groupe est ici une action « consécutive » (follow-on action) car la responsabilité du professionnel ne peut être prononcée que sur le fondement d’une décision prononcée à l’encontre du professionnel par les autorités ou juridictions nationales ou de l’Union européenne compétentes, qui constate les manquements et qui n’est plus susceptible de recours pour la partie relative à l’établissement des manquements. L’action de groupe consécutive doit être intentée dans un délai de 5 ans à compter de la date à laquelle la décision susmentionnée n’est plus susceptible de recours.

Dans la version originalement adoptée par la loi Hamon (C. consom., art. L. 423-17), il était prévu que « Dans ces cas, les manquements du professionnel sont réputés établis de manière irréfragable pour l’application de l’article L. 423-3 » (sur la notion de présomption irréfragable. L’ordonnance n° 2017-303 du  9 mars 2017, transposant la directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014 relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l’Union européenne a été éliminée la présomption, qui apparaît désormais à l’article L. 481-2, alinéa 1er  2 du Code de commerce.

Difficultés subjectives et objectives

L’action de groupe permet de regrouper uniquement des consommateurs, personnes physiques (C. consom., art. liminaire). Ainsi, les PME et d’autres personnes morales victimes de pratiques anticoncurrentielles ne pourront adhérer à une action de groupe pour en bénéficier. Elles ne pourront non plus l’engager directement ni par l’intermédiaire d’associations créées ad hoc (qui n’ont pas de qualité pour agir) ni d’associations ayant 5 ans d’ancienneté. En effet, le socle « commun » a exclu explicitement les actions de groupe « consommation » et « concurrence ».

En outre, se pose la question de savoir s’il est possible d’introduire une action de groupe à la suite d’une décision du ministère de l’Économie en matière de micro-pratiques anticoncurrentielles. Le code est muet mais la circulaire accompagnant le décret du 24 septembre 2014 semble l’exclure explicitement.

Des règles dérogatoires en matière de pratiques anticoncurrentielles

A la différence des règles communes de l’action de groupe « consommation », le juge peut ordonner la  publicité des mesures pour l’adhésion, avant que le jugement ne soit définitif, afin de permettre aux consommateurs d’adhérer au groupe dans le délai imparti.

En outre, la décision de l’Autorité de la concurrence interrompt la prescription de l’action de groupe pendant 5 ans, à compter depuis la date de ladite décision.

Par ailleurs, nous pensons que les règles portant évolution des procédures indemnitaires en droit de la concurrence s’appliquent aux actions de groupe, dans la mesure de leur compatibilité. C’est notamment le cas du régime instauré lors de l’ordonnance et du décret du 9 mars 2017 (Ord. n° 2017-303, 9 mars 2017. – D. n° 2017-305, 9 mars 2017), transposant la directive 2014/104/UE du 26 novembre 2014, relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l’Union européenne (directive Antitrust) et qui s’applique aux actions en réparation relatives aux ententes, abus de position dominante, aux accords sur les droits exclusifs d’importation en outre-mer, aux accords et pratiques dans le domaine du transport ainsi qu’aux pratiques de prix abusivement bas. Son champ d’application est plus large que celui de la directive, le législateur français ayant voulu assurer une égalité de traitement des victimes d’infractions au droit de la concurrence (S. Carval, Les actions en dommages-intérêts des victimes de pratiques anticoncurrentielles : JCP G 2017, n° 12).

Sur l’applicabilité des règles substantielles (de responsabilité « concurrentielle », notion d’entreprise) et probatoires (présomption de dommage, de non-répercussion des surcoûts, règles processuelles, relatives à la production et à la communication de pièces,) aux actions de groupe, v. M. J. Azar-Baud, fascicule Actions de groupe, Juris-Classeur, LexisNexis, 2021.

Sur le nombre d’actions de groupe : Registre

Pour aller plus loin :

• J. Azar-Baud et Fabienne Jault, Collective redress in Competition law : European and private international law approach, in Private Enforcement of Competition Law in Europe. Directive 2014/104/EU and Beyond. Larcier, 1re édition 2021., p. 87 à 100.

• Amaro et M. J. Azar-Baud, L’effet des décisions des autorités de concurrence devant les juridictions nationales : autorité de chose jugée, autorité de chose décidée, présomption irréfragable, notion sui generis, in L’intensification de la réparation des dommages issus des pratiques anticoncurrentielles, M. Behar-Touchais, D. Bosco, C. Prieto, (dir.), t. 70 : IRJS éditions, 2016, p. 95-128